Jacques Delpla : « L’Allemagne doit 575 milliards d’euros à la Grèce »

L’économiste, membre du Conseil d’analyse économique, a calculé que les Allemands doivent aux Grecs au moins 575 milliards d’euros au titre de la seconde guerre mondiale. Il estime que l’Europe doit absorber l’excès de dette en la refinançant par des taux d’intérêt très bas, en échange de réformes structurelles.

L’accord des ministres des Finances, dimanche, en faveur d’une nouvelle aide à la Grèce et d’une participation du secteur privé au financement de sa dette va-t-il calmer durablement les marchés?

Les marchés, ce n’est plus vraiment le problème de la Grèce. Pour les 10 à 20 prochaines années, le financement de la dette grecque va être réalisé par deux moyens : pour une grosse moitié, par des financements publics et pour une petite moitié par les banques et les assureurs, via la fameuse « initiative de Vienne », c’est-à-dire le maintien de leur exposition. Il n’y aura plus de passage par les marchés.

L’Allemagne a renoncé à sa proposition de rééchelonnement de la dette. C’est une bonne nouvelle ?

Les Allemands n’ont pas vu que leur proposition d’échange obligatoire de titres de dette amenait tout droit à un défaut grec. Or s’il y a un défaut sur la dette grecque, c’est la faillite immédiate de tout son secteur financier qui est gorgé d’obligations souveraines. Aucune banque centrale ne peut refinancer de la dette en défaut : la BCE ne le fera pas. C’est donc l’attaque cardiaque immédiate assurée pour la Grèce avec une interruption du système des paiements domestiques, jusqu’au paiement des salaires et au fonctionnement des hôpitaux. La Grèce se retrouverait dans l’euro sans pouvoir utiliser l’euro. La seule solution pour elle serait alors de sortir de l’euro, avec une méga récession et le risque de contagion qu’on connaît.

Pour vous, c’est la solidarité financière qui doit l’emporter ?

Tout le monde connaît la fable de la cigale et la fourmi. Mais l’histoire se poursuit car : c’est la fourmi qui a financé la cigale dans le passé et qui porte donc ses dettes; les grands parents de la fourmi ont exterminé les grands parents de la cigale et ils portent donc une lourde responsabilité politique et financière. Selon mes calculs, les Allemands doivent aux Grecs au moins 575 milliards d’euros au titre de la seconde guerre mondiale. Les Allemands doivent beaucoup plus à la Grèce que les Grecs ne doivent à l’Allemagne. Et enfin, ils habitent tous les deux dans le même building, et si l’on fait imploser l’appartement de la cigale, tout le monde s’effondre. La morale de l’histoire c’est que deux choses doivent à mon avis être respectées : le contrat de la Grèce avec l’Europe et le contrat de l’Allemagne avec l’Europe.

Commençons par le contrat de l’Allemagne avec l’Europe.

L’Allemagne a payé sa réunification en offrant sa monnaie et en acceptant l’euro. De leur côté, ses partenaires se sont engagés à être sérieux. Le contrat n’a pas été honoré. Et les Allemands pensent à juste titre que l’esprit du traité de Maastricht a été violé. Aussi il faut réformer l’Europe économique. Mais il faut aussi que chacun prenne ses responsabilités et partage le fardeau des erreurs commises et des pertes engendrées. Il faut que les Européens absorbent ensemble la dette excessive des trois pays (Grèce, Portugal et Irlande) en la refinançant par des taux d’intérêt extrêmement bas, à 3% ou 4%, pendant 10 ou 20 ans. En échange, ces pays doivent faire toutes les réformes budgétaires et structurelles nécessaires, pendant longtemps. C’est la seule solution.

Les Allemands ne semblent pas très enthousiastes à cette idée ?

Les Allemands oublient leur dette politique. Il faut le leur rappeler. En 1945 les vainqueurs de la guerre ont tiré un trait sur le capital humain et physique détruit par les Nazis. On a fait la CECA et le Traité de Rome. Le passif politique et financier de l’Allemagne au titre de la guerre se monte à 16 fois le PIB allemand, on peut appeler cela la dette implicite de l’Allemagne. On ne la lui réclame pas, en échange, on lui demande de jouer le jeu européen, d’un point de vue politique et financier. Aujourd’hui, cela signifie sauver la Grèce.

Les Grecs pourront-ils rembourser leur dette ?

Ils le doivent ! Et ils le peuvent ! Ils doivent réformer, privatiser, en finir avec la corruption et le népotisme, et passer d’un déficit de -15% du PIB à l’équilibre en quelques années. Cela ramènera leur dette entre 60% et 90% du PIB d’ici 2025 à 2030. La Grèce a les moyens de prospérer : elle dispose du plus beau patrimoine archéologique du monde, d’îles magnifiques où il fait bon vivre. Je pense que le printemps arabe est une formidable opportunité pour ce pays, plate-forme de l’Europe en méditerranée orientale.

Vous excluez donc totalement l’hypothèse d’une restructuration ?

On ne peut pas empêcher les gens de se suicider. Les Grecs ont le choix entre le toboggan et le saut en parachute… sans parachute. Ils doivent comprendre qu’il leur est impossible de conserver leur niveau de vie d’avant la crise, financé par un déficit budgétaire hallucinant. Soit ils choisissent le toboggan avec une baisse du niveau de vie de 10% sur 5 ans. Et ils y ont intérêt car l’aide européenne est considérable : elle consiste en une subvention implicite de taux d’intérêt qui représente de 15 à 20% du PIB grec (12% pour les Irlandais et 10 % pour les Portugais). Mais ils peuvent aussi démocratiquement refuser de relever ce défi. Mais alors, leur économie s’écroulera ; ils n’auront plus d’aide et ils devront sortir de l’euro… sans parachute.

L’Allemagne réfléchirait pourtant sérieusement à une zone euro à deux vitesses ?

Dans l’inconscient allemand, les Grecs ne méritent pas d’appartenir à la zone euro. C’est le discours de la droite conservatrice allemande qui rêve d’une zone euro avec Autriche, Slovaquie, Finlande, Hollande -et France pour des raisons historiques. Mais un tel système, la France n’en veut pas et surtout, il viole le contrat européen de base d’après-guerre. Si vous recréez une zone euro avec tous les bons élèves de la classe et une autre les pays périphériques, la deuxième explosera rapidement en hyperinflation.

Concrètement, comment va s’organiser la participation du secteur privé dans le financement à venir de la dette grecque ?

L’idéal serait qu’on se fonde sur la répartition de l’exposition à la Grèce du secteur privé européen avant la crise et que les rachats de titres soient répartis en fonction. Cela permettra une répartition du fardeau, que j’estime à environ 100 milliards d’euros pour les banques et assureurs européens non grecs. Et cela évite que les banques qui ont joué le jeu d’un maintien de l’exposition ne soient pénalisées.

Les banques allemandes trouvent le principe du « roll over » trop strict. Elles souhaitent des incitations pour leur contribution. Qu’en pensez-vous ?

Les banquiers voudraient avoir été sauvés par les gouvernements et ne pas renvoyer l’ascenseur. Les dirigeants allemands n’ont pas été assez clairs à ce sujet avec leurs banques.

Comment faire pour qu’une crise de cette nature ne se reproduise pas ?

La solution que je préconise c’est de changer radicalement la structure du marché obligataire en Europe. On couperait les dettes de tous les pays de la zone euro en deux. D’un côté, la dette senior, dite bleue, jusqu’à 60% du PIB, que l’on mettrait en commun au niveau de la zone euro et qui serait gérée par une agence européenne de la dette. Elle représenterait 6000 milliards d’euros et deviendrait la dette la plus sûre du monde. Elle serait même moins chère que le Bund allemand ou les OAT françaises actuels car ce marché serait beaucoup plus vaste et liquide. Cela constituerait un concurrent au marché américain de la dette. A cette dette bleue serait attachée une garantie conjointe et solidaire dette, ainsi elle ne serait pas susceptible de faire défaut. A terme, ma conviction forte est qu’il n’y a pas d’avenir de zone euro sans une dette commune gouvernementale, la dette Bleue. D’un autre côté, au-dessus de ces 60% du PIB, la dette rouge, junior qui incorporerait l’ensemble du risque souverain. Elle pourrait absorber des pertes ou même faire défaut sans que cela ne provoque une catastrophe. La force des dettes bleues et rouges est que ce système donne toutes les bonnes incitations : les taux d’intérêt monteront très en amont d’une difficulté.

REPERE Comprendre la crise grecque

DOSSIER La crise de la dette en Europe

PROPOS RECUEILLIS PAR CATHERINE CHATIGNOUX ET RICHARD HIAULT

Lesechos.fr • Le 22 juin 2011

http://archives.lesechos.fr/archives/2011/lesechos.fr/06/22/0201458716889.htm

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3 comments on “Jacques Delpla : « L’Allemagne doit 575 milliards d’euros à la Grèce »

  1. αυτο το κιμενο ειναι εκτος επεικεροτιτας ο κυριος αυτος το τομαρι της ευρωπης προστατεβη οπως ολοι οι αλλοι
    με το τροιο στουτζες για κυβερνηση αντιο ελλαδα αντιο ελληνες
    και μην περιμενετε απο τους αριστερους πολλα πραγματα αυτη εχουν αλλη πιπιλα
    πριν ειναι αργα παρτε τα οπλα μονο με ενοπλο αγωνα θα γλυτοσουμε
    δινατοτιτες ειπαρχουν πολλες ανδρες να της εφαρμοσουν δεν εχουμε
    μονο ανδροφανης πορνες διαθετουμε
    το δεντρο της λευτεριας ανθυζη μονο αν ποτιστι με αιμα

    ιωαννιδης χαραλαμπος

  2. ΔΗΜΟΣΙΕΥΣΗ: 16 Φεβρουαρίου 2015

    El Publico: Η Γερμανία χρωστά στην Ελλάδα κι όχι το αντίστροφο

    Ως σοβαρό πολιτικό ζήτημα αλλά και ισχυρό διαπραγματευτικό χαρτί υπέρ της Ελλάδας βλέπει τη μη αποπληρωμή του κατοχικού δανείου και των επανορθωτικών υποχρεώσεων από τη Γερμανία, η ισπανική ηλεκτρονική εφημερίδα El Publico.

    Το άρθρο τιτλοφορείται «Το χρέος της ναζιστικής Γερμανίας ξεπερνά όσα ζητούν οι Μέρκελ και ΕΕ από την Αθήνα» και στηρίζεται σε στοιχεία από μελέτες γνωστών και καθ’ όλα έγκριτων Ισπανών ιστορικών κι οικονομολόγων. Πρόκεται για έναν εκτενή απολογισμό των γεγονότων από την επιβολή από το χιτλερικό καθεστώς του αναγκαστικού δανείου, ισοδύναμου με 3 δισ. ευρώ, τη συνδιάσκεψη του 1953 για τη διαγραφή του 63% του συνολικού εξωτερικού χρέους της Γερμανίας, έως τη συμφωνία των «Δύο συν Τέσσερις» του 1990 για τη μη πληρωμή των επανορθωτικών υποχρεώσεων του Βερολίνου, ενόψει της ενοποίησης των δύο Γερμανιών.

    Σύμφωνα με τον καθηγητή Ιστορίας Εδμούνδο Φαγιάνας Εσκουέρ, εάν για το κατοχικό δάνειο «ισοδύναμο με 3 δισ. ευρώ», «εφαρμοσθεί ως σημείο αναφοράς το μέσο επιτόκιο των αμερικανικών ομολόγων, το ποσόν που θα έπρεπε σήμερα να καταβάλει η Γερμανία θα ήταν 163,800 δισ. ευρώ».

    Ποσόν που ουδέποτε καταβλήθηκε, υπενθυμίζει από την πλευρά του κι ο καθηγητής Σύγχρονης Ιστορίας στο Παν/μιο Κομπλουτένσε της Μαδρίτης Κάρλος Σάνθ Ντίαθ, «μολονότι η Κατοχή στην Ελλάδα ήταν μία από τις ωμότερες στην Ευρώπη» επισημαίνοντας τις μεγάλες απώλειες, από πείνα και κακουχίες, μεταξύ του πληθυσμού τις χώρας και τις καταστροφικές επιπτώσεις στην οικονομία της Ελλάδας.

    «Ο υπολογισμός της καταστροφής» εκτιμά ο Φαγιάνας Εσκουέρ «ποικίλει ανάλογα με τις διάφορες εκτιμήσεις, που την ανάγουν σε έως και 300 δισεκ. ευρώ. Ποσό που ο Γάλλος οικονομολόγος και πρώην σύμβουλος του Νικολά Σαρκοζί, Ζακ Ντεπλά, ανεβάζει ακόμη και στα 575 δισεκ. ευρώ» υπογραμμίζεται στο ίδιο άρθρο. «Είναι σαφές πως με αυτά τα ποσά, η Ελλάδα όχι απλώς θα είχε λύσει το πρόβλημα του χρέους, αλλά θα της περίσσευαν και χρήματα» προσθέτει ο ίδιος καθηγητής. Μάλιστα η εφημερίδα σημειώνει ιδιαίτερα, πως οι αποζημιώσεις, που αξιώνουν οι Έλληνες, δε φθάνουν ούτε καν στα πραγματικά χρηματικά ύψη που πρέπει να τους δοθούν: «162 δισεκ. ευρώ, χωρίς να υπολογισθούν τα επιτόκια από την εποχή της Κατοχής (….) τα 108 δισεκ. αντιστοιχούν στις καταστροφές των υποδομών, ενώ τα υπόλοιπα στο καταναγκαστικό δάνειο της δοσίλογης κυβέρνησης».

    Αναφορικά με τη δυσαρέσκεια της γερμανικής κυβέρνησης για τη μετεκλογική στάση του ΣΥΡΙΖΑ απέναντι στο θέμα των επανορθώσεων, αλλά και στον παραλληλισμό που «τόλμησε» ο υπουργός Οικονομικών Γιάνης Βαρουφάκης στο Βερολίνο με την κατάσταση που οδηγεί στην άνοδο των νεοναζί στην Ελλάδα, ο καθηγητής στο UCM Κάρλος Σανθ Ντίαθ δηλώνει πως «δεν ήταν μία αναιδής στάση. Κανένα άλλο έθνος δεν μπορεί να κατανοήσει καλύτερα την κατάσταση στην Ελλάδα. Η Ευρώπη οφείλει να διδαχθεί το μάθημα πως, όταν φέρνουν έναν λαό στην απογοήτευση και την ταπείνωση, ο δρόμος προς τον εξτρεμισμό ανοίγει διάπλατα».

    Ο Σανθ Ντίαθ επιπλέον υπενθυμίζει πως η «Γερμανία πέτυχε από την Ευρώπη συμφωνία ότι πάνω απ’ όλα δεν πρόκειται να αποζημιώσει τις χώρες της Νότιας Ευρώπης», για τις «βοήθειες» εν είδει άλλου «Σχεδίου Μάρσαλ» που τις εξανάγκασε να της δώσουν στον Β’ Παγκόσμιο Πόλεμο. Συμφωνία που, όπως υπογράμμισε ο Γερμανός οικονομολόγος του London School of Economics Άλμπρεχτ Ριτσλ (σε συνέντευξή του στο Der Spiegel το 2011), καθιστά τη Γερμανία στον μεγαλύτερο χρεώστη του 20ου αιώνα, αλλά ακόμη και σε όλη την σύγχρονη χρηματοοικονομική ιστορία, καθώς ήταν πρωταγωνιστής στις πιο βαριές εθνικές χρεοκοπίες».

    Κατά τον Σανθ Ντίαθ, η Ελλάδα έχει όλους τους καλούς λόγους και τα ιστορικά δεδικασμένα για να αξιώσει μία επίλυση του χρέους της… à la Γερμανικά, υπογραμμίζοντας πως χάρις σ’ αυτές τις χαριστικές συμφωνίες μπόρεσε να επανεκκινήσει το σημερινό γερμανικό οικονομικό θαύμα, να τεθούν οι βάσεις για τη σημερινή ανάπτυξή της. Καταλήγοντας σχολιάζει: «Η Γερμανία ήταν η χώρα που επωφελήθηκε όσο καμμία άλλη από την ΕΕ, συνεπώς είναι εκείνη που περισσότερο απ’οποιονδήποτε άλλο οφείλει να φροντίσει γι αυτήν». Το άρθρο ολοκληρώνεται με την παρατήρηση του ίδιου καθηγητή, πως ψίχουλα που έδωσε η Γερμανία οιωνεί επανορθώσεων στην Ελλάδα μεταπολεμικά, «ήταν μία αρχική δόση εν αναμονή της διαπραγμάτευσης για την καταβολή των αποζημιώσεων μετά τη (γερμανική) ενοποίηση.

    Με στοιχεία από ΑΠΕ

    http://www.koutipandoras.gr/article/el-publico-i-germania-hrosta-stin-ellada-ki-ohi-antistrofo

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